mardi 16 juillet 2013

SENEGAL : VIH ET STIGMATISATION

SIDA 9 % des personnes vivant avec le VIH ont voulu se suicider

La stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec le VIH/Sida est toujours une réalité au Sénégal. A cause de leur statut, 9% des enquêtés ont eu des pensées suicidaires. Ce chiffre est tiré d’une étude qui a été présentée hier, lors d’un atelier régional sur l'Index de stigmatisation et de discrimination des PVVIH.


SIDA  9 % des personnes vivant avec le VIH ont voulu se suicider

La stigmatisation et la discrimination des personnes vivant avec le VIH/Sida constituent un mur les condamnant à une marginalisation aussi injuste que stérile. C’est évidemment une réalité au Sénégal touchant ces personnes au niveau familial, social et professionnel et entraînant des attitudes négatives de stigmatisation interne très fortes. En effet, une étude sur le Stigma Index réalisée au Sénégal par le Réseau National des Associations de Personnes vivant avec le VIH (RNP+) a touché une population comprenant 436 femmes, soit 69,6%, 186 hommes, soit 29,7% et 4 personnes transgenres (0,6%). Environ une personne sur 5 appartenait ou avait appartenu à une population clé exposée au VIH. Au niveau socio-familial, deux personnes sur 5, soit 7,9% ont rapporté avoir vécu une expérience de stigmatisation ou de discrimination au cours des 12 derniers mois. Environ 20% des participants avait changé de domicile, dans 16% des cas, en raison de leur statut. Une personne sur 5 a déclaré avoir perdu un emploi ou une source de revenu, de façon plus fréquente chez les femmes (23%) que chez les hommes (15%) et dans 24%, les raisons perçues étaient liées au statut VIH. 7 enquêtés sur 10 (70%) rapportent au moins un épisode de stigmatisation interne (auto-stigmatisation), le sentiment de honte prédominant (46% des enquêtés). L’enquête révèle également que 9% des enquêtés ont eu des pensées suicidaires dans l'année précèdent l'enquête. Concernant le dépistage du VIH, dans 73% des cas, la décision de réaliser le test a été volontaire. Dans 16% des cas, elle a été prise sous la pression d'autres personnes, 4% ont été obligés de faire le test et dans 6% des cas, le test était réalisé sans information.

Aminata Touré : «Il faut connaitre son ennemi avant de l’attaquer»

La ministre de la justice, Garde des Sceaux qui présidait la rencontre, est d’avis que la lutte contre le stigma et la discrimination envers les PVVIH ne sera efficace que si elle s’attaque contre toutes les formes de discrimination. Dans ce contexte, précise Mme Aminata Touré, il est donc important d’assurer l’inclusion des populations clés et des populations marginalisées dans les plans d’actions et programmes en matière de VIH/sida, dans le but de garantir leur protection et leur accès à la prévention, au traitement et aux soins. Ainsi, est-il impératif de prendre en compte les besoins spécifiques de ces populations dans la mise en œuvre des politiques et programmes nationaux sur le VIH/sida.

Elle déplore que les informations, pour caractériser les formes de stigma et de discrimination envers les personnes vivant avec l VIH/Sida, soient données sous formes anecdotiques. Du coup, se désole-t-elle, elles n’intéressaient plus vraiment les acteurs politiques ou alors, elles étaient débattues mais sans concrétisation de réponse efficace. «Toute réponse au VIH doit, pour être effective, s’appuyer sur le respect des droits humains et la protection des groupes vulnérables : les femmes et les filles, les enfants, les professionnels du sexe, les hommes qui ont des rapports avec d’autres hommes, les prisonniers», a-t-elle souligné. Elle a cité, pour s’en offusquer, les résultats d’une étude stigma index menée au Nigéria qui rapporte qu’auprès de plus de 1 000 professionnels de soins de santé travaillant directement avec des patients vivant avec le VIH, 43% d’entre eux ont vu des confrères refuser une admission à un patient séropositif.

Mouhamadou BA

MME O. C PVVIH «Ça m’est égal que les gens me regardent d’un autre œil»

C'est rare voire inédit d’entendre une personne vivant avec le VIH sida témoigner à visage découvert sur sa maladie et sa vie quotidienne. O. C. est une femme mariée vivant avec le virus du sida. Tragique destin pour cette femme à l'allure frêle qui se bat sur trois fronts : la maladie, le regard de la société, mais aussi pour sa survie quotidienne. Courageuse, O C a refusé de mendier ou de tendre la main pour survivre, bien que séropositive. Elle a réinvesti la vie des gens ordinaires : l'amour, le travail. Très relax et pleine d’énergie, elle nous balance en pleine figure : «ma séropositivité, je la vis bien! Comme tu me vois, je suis toute gaie et très positive. Je ne me sens pas stigmatisée. La stigmatisation, ça se passe dans la tête. C’est que j’appelle de l’auto-stigmatisation très fréquente chez les personnes vivant avec le VIH. Elles se voient stigmatisées. Ce n’est pas le cas avec moi. Je vis ma vie comme je veux, comme je l’entends. Ma vie n’intéresse personne. Cela m’est égal que les gens me regardent d’un autre œil ou que la société me juge différemment», nous dit-elle. Par conséquent, elle invite les personnes vivant avec le VIH à avoir une estime de soi, à vivre positivement leur séropositivité et la maladie du Sida comme toute autre maladie. «Les Ppvih doivent prendre de la hauteur par rapport à leur statut sérologique», conseille-t-elle.

M. S CHARGE DE COMMUNICATION DE L’ASSOCIATION DES PVVIH «Je vis avec le Vih Sida, mais je ne suis pas malade»

Le destin l’a rattrapé en 2002. En faisant son test de séropositivité, il est tombé de haut lorsque le médecin lui a dit qu’il était séropositif. «Ce jour là, c’était très dur pour moi. J’ai ressenti un choc. C’est comme si la nuit arrivait avec son lot de nuages grisonnants», nous confie M S. Et poursuivre : «Ma séropositivité, je la vis normalement. Je vais au boulot comme tout le monde et j’interviens dans la réponse dans la lutte contre le VIH. Je ne vis pas la stigmatisation au sein de la société. Le seul problème que je rencontre réside au sein de ma famille avec laquelle je partage mon statut sérologique. Seulement, ma famille ne veut pas que j’apparais à la télévision, parce que le sida reste un tabou bâti autour de jugements moraux, religieux, de discriminations sociales et professionnelles», nous fera-t-il savoir. Même si rien n'a presque changé dans la perception qu'ont les gens des séropositifs, M.S de préciser : «nous ne sommes pas des malades, nous vivons seulement avec le Vih. Par contre, nous avons une grande potentialité de tomber malade». M S prend deux types de comprimés, deux fois, par jour.

Mouhamadou BA

Mardi 16 Juillet 2013 - 08:55